Carmelo Bene

Cinéaste, Italie

Carmelo Bene est un « cas » dans le cinéma italien : il reste celui par qui le scandale arrive dans la forme du spectacle. Nous présentons ici les deux longs métrages de Bene qui restent inédits en France et qui comptent cependant parmi ses oeuvres les plus fascinantes. Carmelo Bene est né à Lecce, capitale italienne du Baroque « spagnoleggiante », en 1937. Il grandit dans un milieu méridional, catholique et petit bourgeois, au milieu des églises et des femmes, des « mamme » et des « madonne », dont il projettera tout au long de son oeuvre le double fantasme. Homme de théâtre où, comme auteur, acteur et metteur en scène, il se fait vite remarquer par son anticonformisme et son invention, il vient à la mise en scène de cinéma en 1968, avec Nostra Signoria dei Turchi. Ce premier film, accueilli par la critique parisienne comme une révélation fulgurante, dit son désir d’expression totale à la Artaud et sa recherche de destruction du langage. Comme dans tous ses films successifs (Capricci, Don Juan, Salomé, Un Amleto di meno), il s’y fait lui-même spectatacle, avec toute l’extravagance, la démesure souhaitables, mettant en avant un narcissisme qui est en fait satire de l’intériorité. On le voit depuis 68 jouer son rôle de Robespierre du cinéma (après avoir été, comme il l’a dit lui-même, celui du théâtre), et réécrire les textes les plus « sacrés », de toute la vigueur de son moi hypertrophié qui reconduit tout à une autobiographie, exprimant la frustration et la mutilation que ses contemporains vivent sur un mode moins exaspéré.