Dans ce film sans acteur, le cinéaste russe parcourt un espace quotidien qu’il transfigure et réinvente en un chef-d’œuvre inoubliable. L’Homme à la caméra parcourt en toute liberté la vie quotidienne d’une grande cité soviétique tout en inventant un langage filmique.
« Que faire aujourd’hui d’un film comme L’Homme à la caméra ? L’admirer, en goûter les beautés et les étranges fulgurances, l’étudier comme un “classique” ? Sans doute – et ce ne serait déjà pas si mal. Mais ce serait si peu. Si peu au regard de l’ambition du film. Qui était d’être – une Genèse cinématographique du monde nouveau, rien de moins ! Désir absolu d’un cinéma total ! Cinéma comme équation définitive du temps et de l’espace ! De l’individu et de la masse ! Du rêve et de la réalité ! (…) Voilà un film qui s’est vraiment pensé comme révolutionnaire. Qui l’a été. Qui a bouleversé les conceptions du cinéma en vigueur en son temps. Qui a fait le tour du monde en quelques mois. Qui a influencé d’autres cinéastes, qui a suscité des imitations, des rejets. Des passions, des colères. »
Jean-Louis Comolli, Vertiges de l’œil, CRAC, Valence, 1994