Jeudi 2 juillet

Voyage en Turquie
Autour de l’exposition Turquie Cinémascope de Nuri Bilge Ceylan

Pour la première fois en France, le Festival présente, dans le cadre de la Saison de la Turquie, une exposition des photographies de Nuri Bilge Ceylan.

Voyage en Turquie
Autour de l’exposition Turquie Cinémascope de Nuri Bilge Ceylan

Pour la première fois en France, le Festival présente, dans le cadre de la Saison de la Turquie, une exposition des photographies de Nuri Bilge Ceylan.
Les 40 tirages couleur, en grand format, appartiennent à la série Turquie Cinémascope, que Ceylan a réalisé entre 2003 et 2006. Ils sont présentés au public à la Médiathèque Michel Crépeau dans un décor très épuré : des cloisons bleues claires, pas de textes ni didascalies. Les photographies de Ceylan parlent d’elles-mêmes et invitent le spectateur à un voyage à travers une Turquie enneigée. Nous y découvrons ses routes désertées, ses chemins de fer, ses villages perchés en haut d’une colline, ses chiens errants et ses gamins qui sillonnent les rues à vélo.

Ceux qui connaissent déjà l’œuvre du cinéaste turc retrouveront dans ses photographies le même équilibre et la même rigueur formelle que ses films. Ceux qui ne la connaissent pas encore, y verront l’œuvre d’un photographe des grandes espaces, des visages pleins de vie qui se détachent sur des horizons à perte de vue. La profondeur de champ est poussée à l’extrême par un grand angle générant une succession de plans différents que le spectateur parcourt du regard. Chaque cliché est presque une invitation au voyage, à s’abandonner au vertige provoquée par l’infinité de l’espace. La composition de chaque photographie est extrêmement rigoureuse et sa beauté formelle éblouissante. Une véritable recherche dans l’épuration des formes est clairement perceptible et les lignes, tantôt droites tantôt sinueuses, assument un rôle centrale dans l’organisation de la composition. Rien n’est laissé au hasard et la composition obéit à des schémas géométriques très précis. Quand la figure humaine n’est pas représentée directement, sa présence ou son passage sont toujours évoqués, à travers un chemin de fer, un village ou les ruines d’un temple grec… ces signes sont là, témoignage impérissable de l’empreinte laissée par l’homme sur les paysages qui changent au rythme des saisons.

Les cieux brumeux, un rayon de soleil qui filtre timidement à travers les épais nuages ou qui se reflète sur les flaques d’eau confèrent aux photographies de Ceylan un chromatisme d’une extrême intensité et d’un grand lyrisme.
L’œuvre photographique de Ceylan a été souvent comparée aux tableaux du peintre flamand Pieter Bruegel. On y retrouve souvent la même succession de plans et le point de vue en contre-plongée. De Bruegel à Lucas van Leyden, Ceylan semble puiser ses sources dans la Renaissance nordique. Mais il serait réducteur et trompeur même, de réduire l’œuvre photographique de Ceylan à une série d’emprunts, par ailleurs extrêmement éloignés de son horizon géographique et culturel. Si un modèle existe, celui-ci serait à rechercher…dans les films de Ceylan ! L’œuvre photographique et cinématographique de Nuri Bilge Ceylan sont complémentaires, l’œil du photographe rencontrant sans arrêt celui du cinéaste, en un jeu perpétuel de regards croisés.

Noémi Didu

Cette exposition se déroule à la Médiathèque Michel Crépeau du 27 juin au 31 août 2009.

Loin des Nuages
Autour de Nuages de Mai de Nuri Bilge Ceylan

Nuages de mai, c’est pour commencer la préparation d’un film que veux réaliser Muzzaffer, un jeune cinéaste qui pour ce faire va rentrer dans sa ville natale turque, chez ses parents.
Au centre de cette intrigue, on trouve quatre personnages masculins, représentant chacun une génération. Le plus jeune , Ali, a neuf ans. Il est le petit neveu de Muzzaffer, qui découvre la vie d’adulte avec ses responsabilités, ses mensonges et entraîne la perte de l’innocence. Ensuite, on trouve le jeune cousin d’une vingtaine d’années qui idéalise Istanbul et veux quitter l’usine dans laquelle il travaille. Le suivant c’est Muzzaffer , le réalisateur pour qui les préparatifs du tournage prennent un peu de temps. Le doyen est représenté par le père, qui lui se bat contre le cadastre pour garder ses terres.

Mais le film nous en dit aussi beaucoup sur son auteur, sur sa famille et surtout sur sa façon de faire ses films. En effet, Ceylan et Muzzaffer son très proche. La polyvalence que l’on connaît du réalisateur aussi bien à la réalisation, au scénario, à l’image ou encore au montage se retrouve parfaitement dans le personnage principal de son film. Cela ne s’arrête pas là, puisque après avoir choisi ses acteurs que l’on sait très proche – sa mère, son père, son meilleur ami – le tournage peut commencer et la famille se retrouve pour tourner une séquence de confession autour d’un feu. Il se trouve que cette scène est la scène centrale de son film précédent Kasaba. Le réalisateur nous montre donc le tournage de son premier long métrage. Ainsi, Nuages de mai apparaît comme un film au caractère autobiographique et métafilmique, qui oscille entre fiction et réalité et qui, à travers de nombreux jeux de mise en abîme, fait ressortir une aisance et une beauté de l’image qui place Ceylan au rang de cinéaste de l’observation.

Auguste
Elève du Lycée Rotrou

Un pont entre deux rêves

Née en 1970, Michaela Schwentner vit et travaille à Vienne.
Professeure à la Kunstuniversitaet de Linz et commissaire d’exposition au Rhiz, à Vienne, Michaela Schwentner est également co-directrice de Mosz, une plateforme de musique expérimentale. Collaborant avec certains grands noms de la scène musicale électronique autrichienne, elle est aussi l’auteur de nombreuses vidéos et de films courts. Dans son travail filmique, Michaela Schwentner s’intéresse notamment à l’idée de l’abstraction captée par l’image en mouvement. Au travers de ses expérimentations, l’artiste ouvre de nouvelles voies pour une réflexion sur la nature du film, de la vidéo et des images conçues par ordinateur.

Dans Swinging (2006, 8 min) le spectateur découvre plusieurs images d’un pont, en surimposition, en transparence et en surimpression. Surmonté d’un double arc métallique, le pont apparaît sur un arrière-champ blanc uni. Bien qu’elles paraissent intenses sur ce fond clair, les couleurs restent douces : des gris, des noirs et quelques nuances de brun, de bleu ou de vert. Les endroits reliés par le pont restent invisibles et ce dernier, capturé comme une structure isolée, devient le point focal d’une reflexion sur le film en tant média.

A l’inverse d’autres vidéos de Michaela Schwentner, le sujet est donc ici aisément identifiable. Au sein de cette architecture, l’artiste réveille cependant une vie autonome, laissant la forme de béton glisser vers une certaine abstraction. En perpetuel mouvement, la perspective offre différents points de vues sur la structure. Les plans se succèdent dans un bal de fondus enchainés où l’on peut admirer le mouvement des pixels. Au sein de ces moments graphiques et picturaux, les jeux sur l’ombre et la lumière, sur les lignes et sur les plans donnent à l’ensemble un caractère hypnotique.

L’oeil de la caméra se balade sur la construction en la détaillant, dévoilant ainsi certains de ses éléments qui nous échapperait en temps normal. En se désinteressant des liens entretenus par les différentes parties du pont à leurs fonctions, naissent d’autres associations, se fondant pour leur part sur les structures formelles. Des formes géométriques se dessinent alors et les câbles reliant le pont à sa superstructure apparaissent comme autant de lignes qui fragilisent le géant de béton et d’acier.

A la différence d’une esquisse, un balancement révèle cependant le caractère tridimensionnel de l’objet, à l’instar du volume de la bande sonore qui change selon les points de vue. Chacun des matériaux possède ses propres caractéristiques sonores et tous ensemble ils façonnent un environnement acoustique autour du pont qui se balance, le faisant résonner avec le monde.

Pour plus d’informations: www.jade-enterprises.at
www.mosz.org

A Hauteur d’hommes
Autour de Kasaba (La Petite ville) de Nuri Bilge Ceylan

Tout débute dans la neige hivernale. Les enfants sont à l’école et lisent machinalement les lois de leur pays, la Turquie. A l’éducation commune des futurs citoyens se mêle l’apprentissage individuel d’un enfant, encadré par sa soeur. Sorti de l’école et arrivé au printemps, l’enfant (Ali) va vivre un parcours initiatique à l’encontre des paysages qui l’entourent, de la nature propre à son pays, la Turquie. Constamment en mouvement, l’enfant quitte la forêt des expériences pour retrouver sa famille autour d’un feu de nuit. Homme central, le grand-père fait le récit de son histoire personnelle englobée dans celle, plus grande, de son pays, la Turquie. En réaction au propos, le jeune adulte (Saffet) intervient pour faire part à ses proches de son envie de départ. La petite ville ne lui convient pas, il veut découvrir une autre facette de son pays, la Turquie, pour poursuivre sa vie comme il l’entend.

Kasaba est le premier long métrage de Ceylan. Inspiré par une nouvelle de son père, Ceylan écrit une fiction qui s’articule sur la double énonciation : particulier / universel, histoire d’un homme / histoire d’un pays. Avec grande délicatesse, la séquence centrale – captivante – de la réunion nocturne mêle esthétique et propos, symbolisant l’empreinte du réalisateur : l’envoûtement par le son et l’image.

Maxime
Elève du Lycée Rotrou

Rencontres nationales Lycéens et Apprentis au cinéma : de Pickpocket à La famille Tenenbaum, quelle éducation artistique au cinéma proposer aux adolescents des lycées et des Centres de Formation des Apprentis ?

Depuis trois ans, les coordinateurs du dispositif national d’éducation au cinéma des lycées et centres de formation des apprentis (CFA), choisissent le cadre du Festival du film de La Rochelle pour faire le point et réfléchir aux problématiques de la rencontre de films par les lycéens et les apprentis.

Officialisé en 1998, Lycéens et Apprentis au cinéma est, après Collège au cinéma (1989) puis Ecole et cinéma (1994), le dernier né des dispositifs d’éducation au cinéma mis en place conjointement par le ministère de la Culture / Centre National de la Cinématographie (1) et le ministère de l’Education nationale. Il vise tous les lycées publics et privés, de la seconde à la terminale (classiques, techniques, agricoles ou professionnels) et les Centres de Formation des Apprentis. En 2007-2008, ils étaient près de 230 000 lycéens et apprentis (8 500 enseignants, 1 900 lycées et CFA) à se rendre trois fois par année scolaire dans une salle de cinéma et à mener, avec des professionnels du cinéma et avec leurs enseignants (volontaires) une approche d’œuvres, non seulement du répertoire, mais aussi contemporaines, de fiction ou documentaire, de genres et de format divers (le court métrage n’est pas oublié) et d’origine variée (même si la France ou les Etats-Unis occupent une place de choix).

Pickpocket de Robert Bresson, S21 la machine de mort Khmère rouge de Rithy Panh, Freaks de Tod Browning, The Host de Joon-ho Bong ou encore Le petit lieutenant de Xavier Beauvois, ainsi que 91 autres films sont proposés pour l’année scolaire 2009-2010 (2), dans un catalogue national, au choix des enseignants et des coordinations régionales, qui rajoutent, pour certaines d’entre elles, des films « régionaux » (non pas exclusivement des films aidés par les régions ou tournés sur leurs territoires, mais des films qui ne seront accessibles que dans la région concernée). Autant de films singuliers, exigeants et de qualité que les adolescents n’iraient pas voir d’eux-mêmes au cinéma. Et c’est bien la fonction d’un tel dispositif : développer la culture cinématographique des adolescents, faire vivre des pratiques culturelles (le film en salle), inscrire la rencontre avec les films dans un travail pédagogique, au sein du lycée ou du CFA.

Pour leurs rencontres nationales 2009, les coordinateurs Lycéens et Apprentis au cinéma ont choisi de s’interroger sur le choix et l’accompagnement des films de leur dispositif : sur quels critères intégrer des films à la liste nationale ? Quels objectifs de programmation se fixer ? Que transmettre en choisissant des films pour des lycéens ou des apprentis?  Autant de questions-clés auxquelles trois intervenants proposeront des réponses : Frédéric Sabouraud, enseignant de cinéma, animateur d’ateliers d’écriture, de réalisation et de formation d’enseignants, critique de cinéma et réalisateur, Thierry Méranger, professeur en section cinéma-audiovisuel et critique aux Cahiers du cinéma, et Frédéric Borgia, délégué général de l’association Cinémas 93 et distributeur au sein de Madadayo Films.

(1) CNC / Service de la diffusion culturelle / 01 44 34 38 57
(2) Depuis la création du dispositif, on compte 103 films (80 longs métrages et 20 courts métrages) inscrits au catalogue.

Jean-Claude Rullier
Pôle d’éducation à l’image de Poitou-Charentes

Nom d’une pipe!

Partir en vacances sans Monsieur Hulot, ce serait comme voyager au pays de l’ennui ou encore aller au cinéma… pour s’endormir dans la gueule du Dragon. Le bruit d’une voiture pétaradante… et le sourire du spectateur revient. On rit de la détresse des personnages, de leurs mimiques. On s’attache à ce grand bonhomme, tout maigre, avec sa pipe et son chapeau. Il est là pour notre grand plaisir, nous laissant rire de la simplicité de sa vie, nous attendrissant devant sa générosité. Mais que serait Monsieur Hulot sans Jacques Tati ? Un enfant sans père ? Un personnage sans créateur ? Jacques Tati se présente comme le double d’un personnage aussi inoubliable que le film lui-même. Les vacances de M. Hulot, quoi de mieux pour commencer les siennes ?

Audrey, Astaline
Elèves du Lycée Rotrou