Mercredi 2 juillet

Proust. Il y en a comme ça dont on préfère parler – quitte à broder inlassablement sur la fatidique question « dans quelle mesure la philosophie de Bergson est-elle mise en relief dans Du Côté de Guermantes ? – plutôt que d’oser l’insensé : dénuder le monument qu’est A la recherche du temps perdu . C’est indéniable, le grand Marcel fait peur. Alors « sacralisation » rimera-t-il éternellement avec « impossible démocratisation ? » Pas si sûr. Le pari était risqué mais il a été relevé avec succès. La responsable ? Véronique Aubouy qui filme depuis 1993 la lecture de la Recherche . L’aventure, forte de ses 77h, continue de croître, se gonflant fièvrement de nouveaux aèdes intimidés, rapsodes fébriles, ou autres chantres émérites. Tous apportent quelque chose de neuf et de merveilleusement universel à ce temple de la création littéraire.

Aliénor Ballangé

Entretien avec Philippe Suinen, Commissaire général aux Relations internationales de la Communauté française de Belgique à Bruxelles

Quelle est la mission du Centre Wallonie-Bruxelles à Paris ?

Le Centre Wallonie-Bruxelles à Paris est le centre culturel belge francophone fondé en septembre 1979 en face du Centre Pompidou. Il est doté d’une salle d’exposition, d’une salle de spectacles, d’une salle de cinéma, d’une librairie, d’une bibliothèque et d’un centre de documentation. Il est l’émanation à Paris du Commissariat général aux Relations internationales de la Communauté française de Belgique (C.G.R.I.). Il a pour mission d’assurer la promotion et la diffusion des œuvres et des artistes de Wallonie et de Bruxelles. En matière cinématographique, il fait le lien entre les professionnels wallons-bruxellois et français, de la mise en production à la présentation en festivals et à la distribution.

Pourquoi parle-t-on d’effervescence du cinéma belge depuis quelques années ?

Vous savez certainement qu’en Belgique la culture est une compétence communautaire et que chaque communauté développe sa propre politique. C’est en effet le cinéma belge francophone qui connaît une reconnaissance internationale depuis plusieurs années. Les premiers signes sont apparus au début des années 1990 avec trois premiers films : Le Maître de musique de Gérard Corbiau (1989), Toto le héros de Jaco van Dormael (1991) et C’est arrivé près de chez vous de Rémy Belvaux avec Benoît Pœlvoorde et André Bonzel (1992). Trois genres et trois styles différents, avec la même passion du cinéma, dans une économie réduite. La Palme d’or attribuée en 1999 à Jean-Pierre et Luc Dardenne pour Rosetta (et le prix d’interprétation à Emilie Dequenne) a provoqué un engouement pour la production cinématographique, notamment en Wallonie. Nous avons aussi de très bonnes écoles de cinéma (l’INSAS à Bruxelles, l’IAD à Louvain-la-Neuve) qui forment à tous les métiers, de la réalisation à la production, en passant par les postes techniques et l’actorat. Plus globalement, la création, l’ouverture à l’autre et l’autodérision font aussi partie de notre culture. Cela explique notre bourgeonnement perpétuel, en francophones non français !

Quelques cinéastes à promouvoir ?
Le C.G.R.I. promeut tous les cinéastes belges francophones, dans la mesure du possible, sélectionnés dans des manifestations prioritaires à l’étranger. Nous avons également publié – en collaboration avec le Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel du Ministère de la Communauté française – des monographies sur des cinéastes majeurs tels Henri Storck, André Delvaux, Chantal Akerman, Marion Hänsel, et en septembre nous éditons un ouvrage sur Jean-Pierre et Luc Dardenne coordonné par Jacqueline Aubenas. Nous avons aussi élaboré et publié des livres sur les réalisateurs de documentaires, de l’animation ou l’art de « filmer la danse ». Nous soutenons aussi la nouvelle génération et nous réjouissons du succès public et critique de Bouli Lanners avec Eldorado . Nous soutenons aussi l’exposition des photos d’Anne Van Aerschot sur le tournage d’ Elève libre de Joachim Lafosse, un des jeunes cinéastes les plus étonnants et prolifiques de ces dernières années, dont les cinémathèques commencent déjà à proposer des rétrospectives. Le nombre de films belges francophones produits par année ne cesse d’augmenter, et la part de premiers films aussi. Ce qui nous promet une diversité toujours renouvelée.

entretien réalisé par Dorothy Malherbe

« Proust lu » de Véronique Aubouy, vidéaste

Au cœur de la ville de La Rochelle, un nouveau lieu fait partie du paysage de votre festival : le Centre Intermondes. Après les rencontres offertes au public au tout début du festival, commence une nouvelle aventure. Aux douze coups de midi, le centre Intermondes lancera une première : 77 heures de projection ininterrompue. Vous êtes tous conviés pour partir à « la recherche du temps perdu » à travers de nombreux lecteurs. Le Centre vous attend pendant plus de trois jours pour cette expérience inédite. Vous pouvez rester le temps que vous souhaitez et vous serez confortablement installés. Une petite madeleine ou un petit thé devant les lectures de PROUST, quoi de mieux pour se cultiver et se distraire agréablement. N’hésitez pas à venir pour faire partie des privilégiés à voir les premières images du film. Et, oui, le film compte 77 heures pour le moment, mais Véronique AUBOUY nous en promet 200.

Médéric Bouillon