À la mort de son père, un grand acteur arménien, la documentariste Tamara Stepanyan décide de revisiter son passé afin d’en restituer la profondeur. On découvre alors que le cinéma arménien de l’ère soviétique est d’une grande richesse, à l’image de ce peuple arménien toujours très éprouvé. Mes fantômes arméniens résonnent alors comme des réminiscences indispensables, entre souvenirs personnels et héritage collectif d’un patrimoine cinématographique national.
« Après avoir perdu mon père il y a quatre ans, j’ai commencé à regarder des photos, des images de lui. C’était un acteur dans le cinéma arménien. Assez vite, j’ai compris que j’avais envie de continuer le dialogue avec lui. Je suis alors allée chercher des images de mon père, dans le cinéma soviétique arménien, auquel il appartient. Quand j’ai compris que je cherchais des images de mon père, qui était devenu un fantôme, j’ai rencontré d’autres fantômes. À partir de là, la petite histoire a rencontré la grande Histoire. Celle du cinéma soviétique arménien, qui a duré de 1924 à 1990. […] C’est un cinéma qui raconte que, malgré tout, les Arméniens arrivent à survivre. Bien sûr, dans certains films soviétiques, on ne parle que de l’idéologie soviétique. Mais malgré tout, c’est aussi un cinéma qui dit que malgré le génocide, malgré les guerres, malgré les catastrophes, les Arméniens se relèvent toujours. Quand j’ai commencé à travailler sur la voix off, j’ai commencé à écrire. En écrivant, j’ai essayé de parler, sans écrire, je fermais les yeux et je commençais à parler et à enregistrer ce que je disais. C’était une sorte d’adresse. À partir d’une transcription, j’améliorerais les textes, mais toujours, et surtout pendant l’enregistrement, j’imaginais mon père et je lui adressais la parole. »
Entretien avec Tamara Stepanyan, arte.tv, Berlin 2025