Les habitants de Vilar de Perdrizes (Tras-os-Montes) au Portugal.
Dans les montagnes du nord Portugal, le Tràs-os-Montes, un village isolé, Vilar de Perdrizes, poursuit deux ans après la révolution du 25 avril 1974 une vie immuable, ancestrale, comme coupée du monde. Un sol pauvre, un climat rude, une économie de subsistance, quelques traits encore vifs d’un mode de vie communautaire. Des maisons de pierre au toit de chaume, centenaires, et d’autres faites de briques et de ciment que construisent les fils revenus de France, d’Allemagne ou d’Amérique. Au sortir de l’hiver, avril est le mois des labours, des semences et des greffes de vigne. À Vilar, le vin est réputé et fait partie du quotidien au même titre que le pain cuit chaque semaine au four communautaire. Et comme pour parfaire cette allusion biblique, avril voit se réaliser de sept ans en sept ans, entre les Rameaux et Pâques, un mystère de la Passion interprété par les habitants du village suivant un texte original, transmis par tradition orale, où le Diable tient le premier rôle. Cette année-là, en avril 1976, c’était aussi la campagne pour les deuxièmes élections libres du Portugal, après 48 ans d’obscurantisme. Terra de abril décrit la vie de ce village au mois d’avril, à travers les répétitions, la préparation et la représentation du Mystère – récit dans le récit où les villageois racontent une histoire qui est aussi leur histoire. Le film se présente sous la forme d’une chronique qui s’articule autour de la dualité temps présent-espace réel (images monochromes) / mémoire culturelle-espace fictionnel (images couleur). Cette dualité se retrouve dans tous les actes et tous les lieux collectifs de la vie quotidienne : le travail aux champs, la construction des maisons, les veillées, le four à pain, le lavoir, l’égise, la place du village. Des hommes, des femmes vivent, parlent et jouent, révélant leur relation au pouvoir, à la religion, à la pauvreté et, à travers les élections, au savoir et à l’ignorance.