Guerra

Pippo Delbono

Italie — essai documentaire — 2003 — 1 h — couleur — vostf

Scénario Pippo Delbono Image Paolo Santolini Montage Marco Spoletini Production Daniela Cattaneo Diaz epr (H) FILMS Source Cinémathèque Suisse, La Cinémathèque de Toulouse

Récompensé du Prix du Meilleur film documentaire à la 60ème Mostra de Venise, Guerra a été inspiré à Pippo Delbono lors de la tournée du spectacle du même nom en Israël et en Palestine. Dans ce film, l’auteur ausculte avec un regard poétique et glaçant cette partie du monde en ruines où misère, haine et massacre font partie du quotidien. Les barbelés, les mendiants, les maisons détruites dessinent le triste portrait de cette « Terre Sainte » marquée par le chaos. Au-delà du cas israélo-palestinien, c’est un discours universel sur la guerre et la sauvagerie de la nature humaine que porte le réalisateur.

« Ce film est né d’une tournée que j’ai faite avec ma compagnie théâtrale en Israël et Palestine. Mais ce n’est ni un documentaire, ni le récit de ce voyage. J’ai compris que, pour retrouver ce voyage dans un lieu de conflit, je devais l’oublier, oublier le conflit, oublier les réflexions sur le conflit, les considérations politiques, la question de savoir qui avait tort et qui avait raison, etc. J’ai donc procédé comme pour une peinture avec les images que j’avais, en suivant des fragments poétiques qui parlent de liberté et de contrainte, de victimes et de puissants, de personnes sans visage, sans nom. Sans porter le moindre jugement. J’ai voulu regarder avec les yeux d’un enfant qui attend, qui ne veut pas comprendre, mais qui est attiré par des visages, des sourires, des images fortes de maisons détruites et de douleur, mais aussi par le ciel et la lumière. Il y a dans mon groupe des personnes comme Bobò – qui est sans voix – ou comme Gianluca qui, avec leurs corps différents, leur logique différente, ont, me semble-t-il, observé la guerre avec innocence, sans porter de jugement.  Voilà, j’ai aimé penser le film comme étant, d’une certaine façon, la guerre vue par les yeux de ces personnes qui, peut-être à cause de leur condition de personnes différentes, peuvent librement être attirés par des choses laides et violentes, mais également par la vie secrète qui se cache pourtant derrière toute blessure. Je ne veux ni comprendre ni prendre position, la guerre est un lieu obscur, tordu, dans l’esprit humain, il est souvent difficile de définir la limite entre le bon et le mauvais, le juste et l’injuste, et il peut être plus facile d’approcher une vérité plus profonde à travers le prisme de la poésie. Cependant, c’est toujours de la danse pour moi, la recherche de la beauté du geste, des nombreux gestes humains qui me racontent quelque chose de secret, une histoire de puissance et de fragilité, de destruction et de construction, de violence et de vie possible malgré tout, de guerre et de paix ; quelque chose d’illogique, d’incompréhensible, mais souvent peut-être de plus vrai. Comme au théâtre, j’ai cherché ici à ne pas me détacher de la vérité et de la lucidité, j’ai cherché à faire un récit qui n’emprunte pas les chemins de la fiction mais ceux de la poésie. »

Pippo Delbono